Définitions et ambiguïtés en théorie des ensembles
Définitions et ambiguïtés en théorie des ensembles
Bonjour,
Est-il juste de dire qu'en théorie (axiomatique ?) des ensembles, les notions ensemble, élément, "est un élément de", ne sont pas bien définies ?
En fait, je dois faire la relecture d'un article, dont le sujet (informatique théorique, décision multicritère) n'a pas vraiment grand-chose à voir avec la théorie des ensembles, mais où les auteurs affirment cela, ce qui me paraît quand même discutable...
Qu'en pensez-vous ?
Et autre chose aussi, par simple curiosité, cette fois, que dire de l'affirmation
La classe* de tous les corps est un ensemble. ?
C'est vrai, indécidable, ça n'a aucun sens, cela manque de données, ou est-ce faux tout simplement ? (je parle de corps, mais j'aurai pu parlé de groupes, ou d'espaces vectoriels, etc.) Je sais que parle de choses que je ne connais pas vraiment, excusez-moi de la légèreté du propos ! Et si je rajoute dans l'affirmation précédente "à un isomorphisme près", ça devient vrai ? Et enfin
La classe de toutes les extensions de corps de $\mathbb{R}$ est un ensemble.
Ce serait-y pas vrai, ça ?
* : euh, au fait, c'est quoi, une "classe" ?
Est-il juste de dire qu'en théorie (axiomatique ?) des ensembles, les notions ensemble, élément, "est un élément de", ne sont pas bien définies ?
En fait, je dois faire la relecture d'un article, dont le sujet (informatique théorique, décision multicritère) n'a pas vraiment grand-chose à voir avec la théorie des ensembles, mais où les auteurs affirment cela, ce qui me paraît quand même discutable...
Qu'en pensez-vous ?
Et autre chose aussi, par simple curiosité, cette fois, que dire de l'affirmation
La classe* de tous les corps est un ensemble. ?
C'est vrai, indécidable, ça n'a aucun sens, cela manque de données, ou est-ce faux tout simplement ? (je parle de corps, mais j'aurai pu parlé de groupes, ou d'espaces vectoriels, etc.) Je sais que parle de choses que je ne connais pas vraiment, excusez-moi de la légèreté du propos ! Et si je rajoute dans l'affirmation précédente "à un isomorphisme près", ça devient vrai ? Et enfin
La classe de toutes les extensions de corps de $\mathbb{R}$ est un ensemble.
Ce serait-y pas vrai, ça ?
* : euh, au fait, c'est quoi, une "classe" ?
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Re: Définitions et ambiguïtés en théorie des ensembles
Tape "classe(mathématique)" sur wikipedia et tu auras un début de réponse ! :DFabcat a écrit : * : euh, au fait, c'est quoi, une "classe" ?
(je viens de le faire et je vais m'y plonger aussi...) Oh, la classe !!
Il faut beaucoup de chaos en soi pour accoucher d'une étoile qui danse- F.Nietzsche
En effet, comment n'avais-je pas pensé à ce bon "vieux" wiki...misto a écrit : Tape "classe(mathématique)" sur wikipedia et tu auras un début de réponse !
Je ne crois malheureusement pas qu'il s'agit d'un bon papier (et la "citation" n'a absolument aucune utilité quant au sujet et au reste du papier !), ta remarque ne fait que coroborer ce que j'en pense ! :?la main gauche a écrit :C'est à l'auteur d'une affirmation qu'incombe la responsabilité de la justifier, pas à d'éventuels lecteurs; ceci est d'autant plus vrai que les dites affirmations sont importantes pour la suite de l'article. Cela aide à reconnaître les bons articles.
Et pour mes questions sinon, ça vous inspire pas ?
Dans la théorie des ensembles, on ne définit pas vraiment ce qu'est un ensemble. On dit que tout est un ensemble, qu'il y a une relation binaire $\in$ entre les ensemble, et qu'elle vérifie certaines propriétés.
Sinon, la classe de tous les corps, ou même la classe de toutes les extensions de $\mathbb{R}$ à isomorphisme près, n'est pas un ensemble (car cette classe contient des ensembles de cardinalité arbitrairement grande).
Sinon, la classe de tous les corps, ou même la classe de toutes les extensions de $\mathbb{R}$ à isomorphisme près, n'est pas un ensemble (car cette classe contient des ensembles de cardinalité arbitrairement grande).
linfir a écrit :on ne définit pas vraiment ce qu'est un ensemble [...] tout est un ensemble
Il n'y aurait pas contradiction, là ? :)linfir a écrit :la classe de toutes les extensions de $\mathbb{R}$ à isomorphisme près, n'est pas un ensemble.
Fort bien, mais peux-tu le prouver ? (Veux-tu dire qu'il existe des extensions de $\mathbb{R}$ de cardinal supérieur à $\aleph_k$, aussi grand que $k$ puisse être ?) Et d'autre part, si tel est effectivement le cas de cette classe, alors comment en déduis-tu qu'il ne peut s'agir d'un ensemble ?linfir a écrit :(car cette classe contient des ensembles de cardinalité arbitrairement grande)
Avant que ce fil ne tourne au gros troll tout crasseux, pourrait-on avoir une esquisse de la définition du mot ``définition'' dans la phrase ``on ne définit pas vraiment ce qu'est un ensemble'' ? J'aimerais bien savoir ce que ce bout de phrase signifie, il reste pour moi assez énigmatique (je suis à peu près sûr de ne pas savoir ce qu'et un définition).
Je voulais dire que la théorie des ensembles ne donne pas de définition ontologique des ensembles... Elle ne fait que préciser les règles qui régissent la relation d'appartenance.
Passons, peu importe... (note : ne plus répondre aux questions philosophico-vaseuses).
Sinon, voici une démonstration (dans ZFC, au moins) du fait que la classe $\mathcal{C}$ des extensions de $\mathbb{R}$, même à isomorphisme près, n'est pas un ensemble :
Si c'était le cas, $\cup \mathcal{C}$, l'union des éléments de $\mathcal{C}$, en serait un aussi, de cardinal supérieur ou égal à celui de n'importe quel élément de $\mathcal{C}$. On choisit $\alpha$ un cardinal strictement plus grand à celui de $\cup \mathcal{C}$.
L'extension $\mathbb{R}(X_i)_{i \in \alpha}$, des fractions rationnelles réelles en $\alpha$ variables est une extension de $\mathbb{R}$, de cardinal trivialement au moins $\alpha$. Par ailleurs, elle doit être isomorphe à un élément de $\mathcal{C}$, et donc être de cardinal inférieur à $\alpha$.
Contradiction.
Passons, peu importe... (note : ne plus répondre aux questions philosophico-vaseuses).
Sinon, voici une démonstration (dans ZFC, au moins) du fait que la classe $\mathcal{C}$ des extensions de $\mathbb{R}$, même à isomorphisme près, n'est pas un ensemble :
Si c'était le cas, $\cup \mathcal{C}$, l'union des éléments de $\mathcal{C}$, en serait un aussi, de cardinal supérieur ou égal à celui de n'importe quel élément de $\mathcal{C}$. On choisit $\alpha$ un cardinal strictement plus grand à celui de $\cup \mathcal{C}$.
L'extension $\mathbb{R}(X_i)_{i \in \alpha}$, des fractions rationnelles réelles en $\alpha$ variables est une extension de $\mathbb{R}$, de cardinal trivialement au moins $\alpha$. Par ailleurs, elle doit être isomorphe à un élément de $\mathcal{C}$, et donc être de cardinal inférieur à $\alpha$.
Contradiction.
Euh, désolé de couper les cheveux en quatre, mais l'union des éléments de $\mathcal{C}$, c'est $\mathcal{C}$ non ? Tu voulais peut-être dire l'union des éléments de tous les corps de $\mathcal{C}$ ?linfir a écrit : Si c'était le cas, $\cup \mathcal{C}$, l'union des éléments de $\mathcal{C}$, en serait un aussi, de cardinal supérieur ou égal à celui de n'importe quel élément de $\mathcal{C}$.
Sinon je crois avoir compris la démo ! :)
Un dernier petit doute, l'extension $\mathbb{R}(X_i)_{i \in \alpha}$, des fractions rationnelles réelles en $\alpha$ variables est-elle vraiment un corps ? Autant de variables, ça fait flipper quand même ! Déjà, pour $\alpha$ étant la puissance du continu, je bloque !
Si je comprend bien, cela se rapporte au fait que les mathématiciens ont bien compris que les définitions ontologiques ne servaient à rien lorsqu'on se préoccupe d'écrire des démonstations et qu'ils laissent donc délibérément ce point de côté dans le gros de leur activité. Ceci dit, il ne faut pas croire que l'ontologie des objets mathématiques n'intéresse personne parmi les mathématiciens --- bien au contraire beaucoup s'y intéressent et ont écrit dessus.linfir a écrit :Je voulais dire que la théorie des ensembles ne donne pas de définition ontologique des ensembles... Elle ne fait que préciser les règles qui régissent la relation d'appartenance.
En retournant du coté de l'article, ne pas faire explicitement le distinguo entre les définitions techniques (celles qu'on utilise quand on fait une démo) et les définitions ontologiques dans un article d'informatique théorique, c'est un peu léger!
Bonjour.
Absent quelques jours, je découvre votre discussion.
Une théorie formelle est écrite dans un langage qui incorpore dans son alphabet l'ensemble des variables, des constantes, des symboles relationnels primitifs et des symboles fonctionnels primitifs ; aucun de ces objets ne sont définis.
Prenons le langage de la théorie des groupes, les symboles relationnels sont réduits à l'égalité ($=$), les constantes se réduisent à l'élément neutre ($e$) et les symboles fonctionnels sont $+$ et $^{-1}$ (par exemple).
Prenons la théorie formelle des ensembles, son langage ne comprend que deux symboles relationnels primitifs $\in$ et $=$.
Étant primitifs, ces symboles ne sont pas définis. L'auteur de l'article a donc raison (du point de vue des logiciens) quand il dit écrit que la notion d'ensemble n'est pas définie.
Il a tort pour la relation "est élément de" : par définition, la formule (à deux variables libres) $x \in y$ se lit "(l'ensemble) $x$ est élément de l'ensemble $y$".
Pour ce qui est des classes, en théorie formelle des ensembles on appelle classe "tout ce qui est caractérisé par une formule à une variable" et "classe propre "toute classe qui n'est pas un ensemble".
Voici deux exemples : la formule $x = x$ définit une classe propre précisément l'univers de tous les ensembles car $\forall\,x \quad x = x$ est un axiome pour toute théorie qui contient le symbole d'égalité donc $\{x \mid x = x\}$ est la classe de tous les ensembles. Un autre exemple, c'est la classe des ordinaux car elle est définie par une formule à une variable libre de la théorie ; idem pour la classe des cardinaux. Par contre, la formule $\forall\,y \quad (y \notin x)$ à une variable libre $x$ définit une classe qui est un ensemble : l'ensemble vide.
Pour conclure sur la classe des groupes ou des corps, il faut savoir ceci : le schéma de substitution assure que l'image d'un ensemble par une relation fonctionnelle est encore un ensemble. Par contraposition, si on a une relation fonctionnelle entre une classe d'objets et une classe propre, on sait alors que le classe source est propre. Or à tout groupe, on peut associer son cardinal et l'on sait fabriquer des groupes de n'importe quel cardinal (par la méthode des groupes libres par exemple) donc la classe des groupes est propre. Idem pour celle des corps de caractéristique donnée.
Absent quelques jours, je découvre votre discussion.
Une théorie formelle est écrite dans un langage qui incorpore dans son alphabet l'ensemble des variables, des constantes, des symboles relationnels primitifs et des symboles fonctionnels primitifs ; aucun de ces objets ne sont définis.
Prenons le langage de la théorie des groupes, les symboles relationnels sont réduits à l'égalité ($=$), les constantes se réduisent à l'élément neutre ($e$) et les symboles fonctionnels sont $+$ et $^{-1}$ (par exemple).
Prenons la théorie formelle des ensembles, son langage ne comprend que deux symboles relationnels primitifs $\in$ et $=$.
Étant primitifs, ces symboles ne sont pas définis. L'auteur de l'article a donc raison (du point de vue des logiciens) quand il dit écrit que la notion d'ensemble n'est pas définie.
Il a tort pour la relation "est élément de" : par définition, la formule (à deux variables libres) $x \in y$ se lit "(l'ensemble) $x$ est élément de l'ensemble $y$".
Pour ce qui est des classes, en théorie formelle des ensembles on appelle classe "tout ce qui est caractérisé par une formule à une variable" et "classe propre "toute classe qui n'est pas un ensemble".
Voici deux exemples : la formule $x = x$ définit une classe propre précisément l'univers de tous les ensembles car $\forall\,x \quad x = x$ est un axiome pour toute théorie qui contient le symbole d'égalité donc $\{x \mid x = x\}$ est la classe de tous les ensembles. Un autre exemple, c'est la classe des ordinaux car elle est définie par une formule à une variable libre de la théorie ; idem pour la classe des cardinaux. Par contre, la formule $\forall\,y \quad (y \notin x)$ à une variable libre $x$ définit une classe qui est un ensemble : l'ensemble vide.
Pour conclure sur la classe des groupes ou des corps, il faut savoir ceci : le schéma de substitution assure que l'image d'un ensemble par une relation fonctionnelle est encore un ensemble. Par contraposition, si on a une relation fonctionnelle entre une classe d'objets et une classe propre, on sait alors que le classe source est propre. Or à tout groupe, on peut associer son cardinal et l'on sait fabriquer des groupes de n'importe quel cardinal (par la méthode des groupes libres par exemple) donc la classe des groupes est propre. Idem pour celle des corps de caractéristique donnée.
Merci Bruno, très intéressant ! Je suis content d'avoir une "définition" nette de ce qu'est une classe et je commence à mieux discerner ce qui est ensemble ou non... Philosophiquement très intéressant, il me semble !
Autre chose, peut-on parler de cardinal d'une classe ? Je dirais que toutes les classes propres n'en ont pas. Est-ce bien le cas ?
Autre chose, peut-on parler de cardinal d'une classe ? Je dirais que toutes les classes propres n'en ont pas. Est-ce bien le cas ?
Bonjour Fabcat.
Un cardinal est un ensemble (c'est un ordinal particulier), le cardinal d'un ensemble $X$ c'est l'unique cardinal qui est en bijection avec X. Par conséquent, une classe propre n'a pas de cardinal. Pour être très formaliste, une application étant un graphe ayant certaines caractéristiques, est, formellement, un ensemble ; on ne peut donc avoir de bijection entre deux classes propres. Il n'en reste pas moins que la relation qui à tout ordinal $\alpha$ associe le cardinal $\aleph_\alpha$ est une relation formelle biunivoque.
Un cardinal est un ensemble (c'est un ordinal particulier), le cardinal d'un ensemble $X$ c'est l'unique cardinal qui est en bijection avec X. Par conséquent, une classe propre n'a pas de cardinal. Pour être très formaliste, une application étant un graphe ayant certaines caractéristiques, est, formellement, un ensemble ; on ne peut donc avoir de bijection entre deux classes propres. Il n'en reste pas moins que la relation qui à tout ordinal $\alpha$ associe le cardinal $\aleph_\alpha$ est une relation formelle biunivoque.
j'en profites pour poser une question toute bete.. formellement, est ce que la bijection est une relation d'equivalence ?? je sais qu'elle satisfait au propriétés d'une relation d'equivalence, mais autrement dit est ce qu'on a le droit de parler d'une relation d'equivalence sans le support d'un ensemble ? du coup, peut on definir le cardinal comme un representant de la classe d'equivalence associée a ce cardinal ?
merci !
merci !
Bonjour jobhertz.
En restant dans le cadre strict de la théorie ZFC, bien sûr, c'est la même réponse que pour le cardinal d'une classe : la relation $F(x,y) :: \exists\,f \quad ``f$ est une bijection entre $x$ et $y"$ est une formule qui s'écrit dans le langage de la théorie des ensembles et il est aisé de vérifier les trois sacro-saints axiomes des relations d'équivalence $\big(\forall\,x \quad F(x,x)\big)$ etc. C'est donc un prédicat d'équivalence, mais ce n'est pas une relation d'équivalence puisque son "graphe" n'est pas un ensemble.
En restant dans le cadre strict de la théorie ZFC, bien sûr, c'est la même réponse que pour le cardinal d'une classe : la relation $F(x,y) :: \exists\,f \quad ``f$ est une bijection entre $x$ et $y"$ est une formule qui s'écrit dans le langage de la théorie des ensembles et il est aisé de vérifier les trois sacro-saints axiomes des relations d'équivalence $\big(\forall\,x \quad F(x,x)\big)$ etc. C'est donc un prédicat d'équivalence, mais ce n'est pas une relation d'équivalence puisque son "graphe" n'est pas un ensemble.
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